Saison d'hiver - Journal d'une danseuse
Toni Bentley
Medium poche
L'école des loisirs
1983
167 pages
Un beau souvenir de lecture, retrouvé au hasard des rayons de la bibliothèque une fois de plus. Un peu comme 'Il suffit d'y croire...' de Laurence Ink. Il m'est apparut sans que je le cherche. J'ai lu ce journal au début des années '90. C'est très rare les récits qui se passent dans les coulisses de danseuses étoiles. Avec ce journal d'hiver, on entre dans le monde du ballet classique. On se retrouve autant sur la scène que derrière le rideaux. Un univers passionnant mais difficile.
Tony Bentley est née à Perth, en Australie, et a pris son premier cours de danse à l'âge de trois ans à Bristol, en Angleterre, où elle fréquentait aussi l'école locale. Quand elle a eu six ans, sa famille a déménagé en Caroline du Nord. Elle y a vécu quatre ans avant de venir à New York."
"Saison d'hiver n'est pas seulement la chronique attachante et très intériorisée de l'une des plus célèbres troupes de ballet du monde; c'est aussi un compte rendu sensible et sincère, parfois douloureux, de l'évolution psychologique et intellectuelle d'une femme vouée entièrement à l'un des arts les plus exigeants: la danse.
Toni Bentley est liée au New York City Ballet depuis qu'à l'âge de onze ans elle a été admise à l'école de l'American Ballet. Sept ans plus tard, elle fait partie de la compagnie.
À l'automne 1980, alors que s'ouvre la saison d'hiver, elle traverse une véritable crise. Sa carrière ne progresse pas, elle piétine. À vingt-deux ans, elle a l'impression que sa vie n'a pas de véritable direction. Pour essayer de tirer quelque chose de positif de cette expérience, sur le papier, sinon sur les planches, elle commence à tenir un journal au jour le jour qui relate ses faits et gestes, et aussi les retours en arrière sur son passé. Son livre nous permet de saisir de très près ce que vit et ressent une danseuse sur scène et en dehors de la scène."
Elle aborde aussi le côté vestimentaire, et les célèbres pointes. Voici l'extrait sur ce qu'ils font avec les pointes.
Les pointes (chaussons de pointes)
Elles coûtent trente dollars la paire (À noter que ce livre a été publié en 1983) (plus quatre dollars quand on les fait faire sur mesure). Elles nous sont envoyées d'Angleterre où de vieux messieurs cousent pour nous jour après jour. Chacune de nous a son "fabricant" désigné par une marque dans le chausson. Le mien est Monsieur Y et il court une rumeur alarmante à son sujet. Monsieur Y serait en train de mourir ou de prendre sa retraite. Pour nous autres, ses fans, ce serait la catastrophe. Quelques-unes d'entre nous ont déjà reçu des chaussons marqués P. Nous ne prenons pas du tout à la légère ce mic-mac de chaussons, pratiqué en Angleterre et sur lequel nous n'avons aucun contrôle! Le résultat, d'ailleurs, c'est que je viens de changer ma commande de pointes.
Nous en usons au moins douze paires par semaine, très souvent plus. Ce qui représente trois cent soixante dollars par fille et par semaine. Multiplié par le nombre de filles: cinquante-quatre, on arrive à un total de 19, 440 dollars par semaine. Et pour les quinze semaines de la saison, à 291,600 dollards. Des pieds hors de prix vraiment!
On sort les pointes neuves de leur sac en plastique, on verse à l'intérieur un liquide spécial (pour durcir le bout), on coud les rubans et les élastiques, on supprime le satin qui recouvre la pointe (et la rend glissante), on enlève la semelle intérieure (qui prend une place inutile), on trempe ensuite la pointe (trop dure ou trop étroite) dans de l'eau ou de l'alcool, on courbe la tige (trop raide), on piétine les pauvres chaussons (généralement trop ronds), on passe à la râpe le cuir de la pointe (encore trop glissant), enfin, on les tape violemment contre le mur (parce qu'ils font trop de bruit). Ils sont enfin à point. On les enfile le temps d'un ballet de quinze minutes, et dès qu'il est fini on les jette parce qu'ils sont morts, inutilisables. Trente dollars vite envolés, non?
Tout le monde s'en fiche. Pour nous, ce ne sont que des chaussons, essentiels bien sûr, mais aussi des ennemis qu'au fond on a plaisir à dominer.
Étonnant ces chaussons 'trop ceci, ou trop cela' :)