Denis Pelletier - Prose sur l'enfance
* * *
Un après-midi du plus bel été de mon enfance
mon chat étendu sur le perron
digérait ses excès de table.
Le bleu au-dessus de la maison
et par dessus les arbres
me disait que rien n'allait bouger.
Les murmures assoupis et les battements feutrés
que faisaient les moineaux
donnaient à nos deux pleupliers
des airs de dortoirs.
Comme je montais à ma chambre
l'horloge se mit à sonner.
Si le temps est si long
c'est que l'horloge est grand-père...
Je m'allongeai sur le lit et là je vis
que la toile de ma fenêtre
baissée en plein midi
répandait une lumière d'un rose tendre à ravir.
Je me laissai baigner dans cette intimité
en pensant comment petit
dans le ventre de ma mère
la peau autour de moi
quand elle était au soleil d'été
devait avoir cette sorte de clarté.
Qu'elle avait bonne haleine cette fenêtre
avec ses rumeurs de lilas.
Que son souffle était cajoleur
en chuchotant que j'allais dormir.
Je baissai les paupières.
Elles me firent elles aussi une toile
d'un rose exactement celui d'avant que je sois né
quand elle s'en fut s'allonger au soleil d'été.
Prose tiré du livre de Denis Pelletier
page 154
L'Arc-en-Soi